Propriété épilatoire huile de souchet.

L'huile de souchet peut-elle éliminer les poils ?

Bien qu'en recul ces dernières années, l’épilation est une pratique encore ancrée dans les habitudes. Diverses solutions existent aujourd'hui pour retirer les poils indésirables, du rasage au laser, en passant par l'épilation à la cire. Certaines personnes prônent aussi que l'application d'huile de souchet, extraite de Cyperus rotundus, permettrait d'éliminer les poils. Si cette affirmation est séduisante, qu'en dit la littérature scientifique ? Découvrons ensemble si le potentiel épilatoire de l'huile de souchet est un mythe ou une réalité.

53%

des Françaises affirmaient épiler leurs aisselles toutes les semaines en 2013.

45%

des Françaises affirmaient épiler leurs aisselles toutes les semaines en 2021.

L'huile de souchet possède-t-elle des propriétés épilatoires ?

Si l’épilation n’est plus un impératif esthétique aussi généralisé qu’autrefois, elle reste une pratique courante pour de nombreuses personnes. Que ce soit pour des raisons de confort ou simplement de préférence personnelle, l’élimination des poils fait toujours partie des routines de soin. Face aux méthodes d'épilation classiques, certaines alternatives naturelles suscitent l’intérêt, notamment l’huile de souchet, réputée pour ralentir la repousse des poils. Cette croyance vient de la médecine ayurvédique, une forme de médecine traditionnelle non-conventionnelle originaire de l'Inde mais également pratiquée dans d'autres parties du monde, comme en Occident. Si l'idée selon laquelle l'huile de souchet pourrait retirer les poils n'est pas nouvelle. Elle connaît un véritable essor ces dernières années et est notamment relayée sur les réseaux sociaux.

De fait, deux études cliniques, menées par MOHAMMED G. F. et son équipe, semblent indiquer que l'huile de souchet pourrait posséder des propriétés épilatoires intéressantes. Cette dernière a été extraite par hydrodistillation des tubercules de Cyperus rotundus mais le pourcentage exact de la solution, de même que le solvant utilisé, n'ont pas été communiqués. La première étude a fait intervenir 91 volontaires présentant des poils indésirables au niveau des aisselles. Les participants ont été séparés en deux groupes : 47 individus ont appliqué deux fois par jour l'huile de souchet pendant six mois, tandis que les 44 autres ont utilisé sans le savoir une solution saline à 0,9%. En parallèle, les participants ont été invités à s'épiler à la cire ou au fil toutes les 3 semaines. Un mois après la dernière séance d'épilation, trois méthodes ont été utilisées pour évaluer les résultats : le comptage des poils, l'évaluation par un observateur indépendant et l'auto-évaluation des patients.

Aisselle d'un participant du groupe "Huile de souchet" avant et après l'étude.
Aisselle d'un participant du groupe "Huile de souchet" avant et après l'étude.
Source : MOHAMMED G. F. Role of Cyperus rotundus oil in decreasing hair growth. Journal of Intercultural Ethnopharmacology (2012).

De très bons résultats ont été obtenus à l'issue des six mois. 97,9% des volontaires du groupe "Huile de souchet" estimaient que leur croissance capillaire avait été réduite contre 0% pour le groupe "Placebo". Par ailleurs, l'observateur a conclu à une diminution des poils supérieure à 60% chez 97,9% des participants du groupe "Huile de souchet", alors qu'aucun effet positif n'a été noté dans le groupe "Placebo". Enfin, une baisse significative du nombre de poils a été observée pour les participants du groupe "Huile de souchet". Les résultats visuels sont eux aussi assez impressionnants.

Nombre de poilsGroupe "Huile de souchet"Groupe "Placebo"
Avant l'étude23,3 ± 10,9 23,9 ± 6,7
Après l'étude1,7 ± 2,124,7 ± 6,2
Évolution du nombre de poils avant et après l'utilisation de l'huile de souchet ou d'un placebo.
Source : MOHAMMED G. F. Role of Cyperus rotundus oil in decreasing hair growth. Journal of Intercultural Ethnopharmacology (2012).

La deuxième étude a suivi un protocole similaire, les participants des groupes "Huile de souchet" et "Placebo" étaient simplement moins nombreux, respectivement 22 et 20. En revanche, un troisième groupe "Laser" a été créé. Les 23 volontaires de ce groupe ont effectué une séance de laser Alexandrite par mois, soit six séances au total. Des résultats sensiblement semblables à la première étude ont été obtenus, et l'application d'huile de souchet en parallèle d'une épilation à la cire ou au fil trois fois par semaine s'est avérée être aussi efficace que le laser.

Nombre de poilsGroupe "Huile de souchet"Groupe "Placebo"Groupe "Laser"
Avant l'étude23,5 ± 10,924,8 ± 6,623,9 ± 6,7
Après l'étude1,9 ± 2,223,7 ± 6,21,4 ± 4,1
Évolution du nombre de poils avant et après l'utilisation de l'huile de souchet ou d'un placebo ou de séances de laser.
MOHAMMED G. F. Topical Cyperus rotundus oil: a new therapeutic modality with comparable efficacy to Alexandrite laser photo-epilation. Aesthetic surgery journal (2014).

En complément d'une méthode d'épilation traditionnelle, ces études suggèrent que l'application d'huile de souchet pourrait être intéressante pour éliminer durablement les poils.

Comment l'huile de souchet agit-elle sur les poils ?

À l'heure actuelle, le mécanisme grâce auquel l'huile de souchet agirait potentiellement sur la pousse des poils est inconnu. Des hypothèses ont néanmoins été émises par le groupe de chercheurs ayant travaillé sur cet extrait botanique. L’un des mécanismes avancés repose sur l’inhibition des cellules souches du follicule pileux. Ces cellules jouent un rôle clé dans la repousse des poils. Les scientifiques supposent que l'huile de souchet pourrait ralentir la régénération des follicules pileux, et ainsi espacer les repousses.

Autre supposition : l'huile de souchet interromprait le cycle cellulaire. Selon cette hypothèse, les follicules pileux verraient leur division ralentie, voire stoppée, entraînant alors une diminution progressive de la repousse. Il est également supposé que l'huile de souchet pourrait induire l'apoptose de ces cellules, c'est-à-dire leur mort cellulaire. Enfin, les chercheurs estiment possible que l'extrait de souchet puisse accélérer le vieillissement des cellules de la papille dermique, la structure vascularisée située à la base du follicule pileux et permettant son approvisionnement en oxygène et en nutriments. En favorisant la sénescence de la papille dermique, le follicule deviendrait moins actif, ce qui pourrait expliquer un ralentissement durable de la croissance des poils.

À l'heure actuelle, ces mécanismes sont uniquement des hypothèses et n'ont pas été prouvés.

En ce qui concerne les molécules de l'huile de souchet responsables de ces potentiels effets, le flou demeure aussi. Des études ont montré que les composés bioactifs retrouvés dans l'huile de souchet variaient significativement selon l'origine de la plante Cyperus rotundus, suggérant l'existence de variétés phytochimiques. Le cyperène (19,2-30,9%) et l'α-cyperone (4,5-25,2%) étaient les constituants les plus abondants des huiles des espèces nigérianes et tunisiennes, mais ce n'était pas le cas de l'espère brésilienne, contenant en majorité de l'α-cyperone (22,8%) et de la cyperotundone (12,1%). En ce qui concerne l'huile de souchet provenant d'Inde, elle renferme plutôt de l'α-copaène (11,4-12,1%), du cyperène (8,4-11,7%), du valérénal (8,7-9,8%), de l'oxyde de caryophyllène (7,8-9,7%) et du trans-pinocarvéol (5,2-7,4%). Les travaux de MOHAMMED et son équipe ne précisant pas de quelle variété de Cyperus rotundus l'extrait a été obtenu, il est difficile de prédire le composé potentiellement responsable du ralentissement de la repousse des poils.

Huile de souchet et épilation : mythe ou réalité ?

Bien que ces résultats puissent sembler prometteurs, plusieurs limites doivent être prises en compte avant de conclure à une réelle efficacité de l’huile de souchet comme méthode d’épilation. Tout d’abord, il est essentiel de noter que, dans ces études, l’huile de souchet n’a jamais été utilisée seule, mais toujours en complément d’une autre méthode d’épilation, à savoir la cire ou le fil. Cela signifie que la réduction observée de la pilosité pourrait être en partie attribuée à la répétition régulière de ces méthodes d'épilation. En effet, on prête à ces dernières la capacité à affiner les poils et ralentir leur repousse sur le long terme, même si cela n'a pas encore été rigoureusement prouvé. Par ailleurs, le manque de détails sur la formulation de l’huile utilisée et la variété de Cyperus rotundus utilisée rend difficile l’évaluation des effets réels et leur application aux produits disponibles sur le marché cosmétique.

L’ajout d’un groupe "Laser" dans la seconde étude est intéressant, mais les résultats suggérant que l’huile de souchet aurait une efficacité comparable à l’épilation au laser Alexandrite doivent être interprétés avec prudence. Le laser est une technique largement validée par des études scientifiques rigoureuses et repose sur un mécanisme d’action bien établi : la photothermolyse sélective. En revanche, le mode d’action de l’huile de souchet sur la repousse des poils reste encore mal compris et demande des investigations plus poussées. Enfin, notons que la persistance des effets après l'arrêt de l'utilisation de l'huile de souchet n'a pas été évaluée. Une diminution de la densité des poils à court terme ne garantit pas un effet épilatoire durable, contrairement aux méthodes comme le laser ou l’électrolyse, qui ciblent directement la destruction des follicules pileux.

En l’état actuel des connaissances, l’huile de souchet ne peut pas être considérée comme une méthode d’épilation à part entière. En revanche, son utilisation en complément d’une technique éprouvée pourrait présenter un intérêt, notamment pour ses propriétés anti-inflammatoires et apaisantes, quant à elles bien documentées.

Diagnostic

Découvrez votre
typologie de peau.