Informations sur le système de pigmentation de la peau (mélanogenèse).

Mélanogenèse : tout savoir sur la physiologie du système pigmentaire.

Carnation, défauts pigmentaires (taches brunes), bronzage... ces phénomènes résultent à l'activation d'une machinerie spécifique responsable de la production de pigments, la mélanine. Dans cet article, nous vous proposons de passer à la loupe ce mécanisme afin de mieux le comprendre.

Les étapes de ce mécanisme physiologie à l'origine de synthèse de mélanine.

La mélanogenèse décrit le processus complexe et essentiel par lequel la mélanine est produite et distribuée par les mélanosomes dans l'épiderme ou les follicules pileux. Ce pigment, de couleur généralement noire ou brune, permet de déterminer la couleur de la peau, des poils, des cheveux et de l'iris de l'oeil.

Les mélanines sont synthétisées à l'intérieur d'organites particuliers, les mélanosomes, contenus eux-même à l'intérieur de mélanocytes, des cellules à forme globulaire pourvues de nombreuses extensions cellulaires (dendrites mélanocytaires) qui leur permettent de rentrer en contact avec plusieurs kératinocytes en remontant jusqu'à la couche épineuse (une des couches de l'épiderme). Elles sont établies à la jonction dermo-épidermique qui repose sur la membrane basale de l'épiderme. Le nombre de mélanocytes varie en fonction des régions du corps : nous comptons environ 1 000 à 1 5000 par mm2 au niveau du corps et 2 000 ou plus par mm2 au niveau du visage.

La mélanine est élaborée à la suite d'une cascade de réactions :

  1. Synthèse d'enzymes nécessaires à ce mécanisme : Parmi les enzymes impliquées dans ce processus, nous avons la tyrosinase, la tyrosinase-related protéines-1 (TRP-1) et la tyrosinase-related protéines-2 (TRP-2). Il s'agit de protéines capables de déclencher, d'activer et de réguler les différentes réactions chimiques conduisant à la synthèse de pigments mélaniques. Elles sont synthétisées au niveau du réticulum endoplasmique rugueux (REG), puis acheminées à l'appareil de Golgi par le biais de vésicules ;

  2. Formation des mélanosomes : Les mélanosomes sont des organites cytoplasmiques à l'intérieur desquels les enzymes formées dans l'étape précédente sont contenues. Ils sont formés par la fusion des micro-vésicules. A ce stade, les mélanosomes sont encore non-pigmentés (immatures) et les tyrosinases inactives ;

  3. Synthèse des mélanines : La mélanine provient de la transformation enzymatique de la tyrosine, un acide aminé fourni par la circulation sanguine, sous l'action de la tyrosinase. A la suite de petites divergences dans la voie de synthèse, deux sortes de pigments mélaniques peuvent être produites : les eumélanines (ou pigments granuleux) de type noir à brun et les phéomélanines (ou pigments diffus) de type jaune à brun rougeâtre avec intervention de composés soufrés (soit sous forme d'un acide aminé, la cystéine, soit sous la forme d'un tripeptide, le glutathion) ;

    Note : Dans les peaux claires, les mélanosomes sont peu nombreux et de maturation souvent incomplète, en plus d'être rapidement dégradés, rendant la peau moins photo-protégée et donc plus exposée aux dommages solaires (brûlures, coups de soleil...), alors que dans les peaux foncées, ils sont nombreux et matures.

  4. Transfert des mélanosomes du mélanocyte aux kératinocytes : De nombreux mélanosomes migrent du corps cellulaire, où ils sont produits, vers la pointe des dendrites des mélanocytes, où ils s'y accumulent, avant d'être transférés dans les kératinocytes environnants des couches supérieures de l'épiderme pour assurer la pigmentation de l'épiderme et sa photoprotection contre les rayons UV. Chaque mélanocyte est en contact avec environ 36 kératinocytes vers lesquels les mélanosomes migrent ;

  5. Dégradation des mélanosomes dans les kératinocytes : Une fois le transfert aux cellules épidermiques adjacents effectué, les mélanosomes sont ensuite progressivement éliminés avec les kératinocytes lors de leur ascension vers la surface cutanée.

Note : Les différences de pigmentation de la peau est due à la proportion de chaque type de mélanine synthétisée et de la taille des mélanosomes (donc de la quantité de mélanine), et non aux nombres de mélanocytes qui restent sensiblement équivalents pour les différentes carnations.

Mélanine : la fonction biologique de la pigmentation.

Outre le fait de colorer les poils, les cheveux, les yeux et la peau, le rôle physiologique majeur de la mélanine est d'être un système de protection de l'épiderme et des couches profondes contre les agressions extérieures, en particulier des radiations UV. En effet, la production de mélanine constitue une réponse adaptative de l'organisme à des expositions prolongées au soleil. Elle joue ainsi un rôle photoprotecteur.

Ainsi, le bronzage n'est rien d'autre que le mécanisme naturel de protection de la peau contre les UV.

En effet, en s’exposant au soleil, les cellules épidermiques subissent l’attaque des UVA et des UVB, pouvant entraîner des défauts métaboliques (vieillissement), la mort cellulaire et le développement de cancer de la peau. Pour se protéger des dégâts induits par les UV, le mécanisme de mélanogenèse est alors déclenché. La mélanine produite se regroupe autour du noyau des kératinocytes pour former un "filtre" (phénomène de capping) dans le but de protéger l'ADN (matériel génétique) des effets mutagènes et cancérigènes des UV.

Elle va absorber jusqu'à 90% des rayons de longueurs d'onde des UV jusqu'au domaine du visible ayant franchi la couche cornée et les empêcher de traverser l'épiderme. Même si les UVA sont responsables de la pigmentation rapide, mais non-persistante, de la peau par oxydation de la mélanine existante, ce sont les UVB qui sont responsables du bronzage plus durable. Malgré ce système de photoprotection, environ 15% des UVB parviennent encore à atteindre la couche basale et 50% des UVA le derme.

La mélanine a aussi la capacité de capturer les radicaux libres générés au sein des mélanocytes et des kératinocytes par les radiations UV, limitant ainsi le vieillissement prématuré de la peau.

Par contre, la production de mélanine tend à diminuer avec l’âge. Pourtant, l’effet protecteur de la mélanine n’est valable que si elle est en quantité suffisante. Ainsi, un déficit en mélanine génère parfois des troubles pigmentaires au cours du vieillissement, à l’exemple du vitiligo, une maladie de la peau qui se manifeste par l’apparition des taches blanches ou encore de lentigos séniles. Cette diminution de la synthèse de mélanine est en fait due à une baisse dans le nombre de mélanocytes qui ne sont plus renouvelés et dans leur activité. Effectivement, l'activité et le nombre de mélanocytes diminuent de 10 à 20% par décennie à partir de 30 ans.

Note : L'activité des mélanocytes épidermiques est continue, alors ceux des follicules pileux suit le rythme du cycle pilaire.

Les divers facteurs biologiques qui peuvent déclencher cette voie de signalisation intracellulaire.

Un certain nombre d'éléments intrinsèques et extrinsèques peuvent déclencher le processus de production de mélanine, notamment :

  • Irradiation UV : Les rayons UV sont bien connus pour stimuler la mélanogenèse par augmentation de la synthèse de mélanine et accélération de leur transfert vers les cellules épidermiques. Ils se manifestent notamment par l'apparition de petites macules sombres, rondes ou ovales, sur les parties du corps fréquemment exposées (visage, cou, dos des mains...), ce sont les lentigos solaires ;

  • Variations hormonales : La pigmentation peut être modulée par les hormones véhiculées par l'apport du sang, comme l'oestrogène, qui a un rôle stimulant induisant une hyperactivité des mélanocytes. Ce phénomène se traduit par la formation de zones beiges à brunes et irrégulières sur le corps, appelées mélasma. Il tend principalement à apparaître chez les femmes adultes pendant la grossesse ou lors de la prise d'une contraception orale ;

  • Inflammation : Certaines molécules inflammatoires (prostaglantines, leucotriènes, thromboxanes) boostent l'activité de la tyrosinase, enzyme clé de la mélanogenèse, et sont ainsi responsables de l'hyperpigmentation post-inflammatoire (taches résiduelles hyperpigmentées qui persistent après la guérison d'une affection cutanée comme l'acné).

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