Quelles sont les spécificités de la peau du contour des yeux ?

La peau du contour des yeux est la plus fine du corps humain, avec une épaisseur totale d’environ 0,3 à 0,5 mm, contre 1 à 1,5 mm en moyenne sur le reste du visage. Cette finesse est principalement due à une couche cornée mince et peu kératinisée, associée à une épaisseur dermique réduite. Au niveau du contour des yeux, les kératinocytes, les principales cellules de l'épiderme, présentent une cohésion intercellulaire fragile. Cela est en lien avec un réseau de desmosomes clairsemé. Pour rappel, les desmosomes sont des structures moléculaires complexes organisées autour de glycoprotéines transmembranaires qui assurent la jonction entre les kératinocytes.

La finesse de la peau du contour des yeux facilite ainsi l'absorption des actifs cosmétiques présents dans les soins contour des yeux mais favorise également la pénétration des allergènes et des pathogènes environnementaux. De plus, cette faible épaisseur rend la peau translucide et laisse facilement apparaître les capillaires sanguins. C'est l'une des raisons pour lesquelles la zone du contour des yeux est souvent sujette aux cernes bleutés.

Le film hydrolipidique est une fine émulsion composée de sueur, de sébum et d’eau, qui joue un rôle essentiel dans la protection de la peau. Il forme une barrière semi-occlusive à la surface de l’épiderme, limitant la perte en eau transépidermique et empêchant l’entrée de micro-organismes pathogènes. Or, au niveau du contour des yeux, ce film est presque inexistant, en raison d’une très faible densité en glandes sébacées et sudoripares, respectivement responsables de la synthèse du sébum et de la sueur. Cette carence en film hydrolipidique prive le contour des yeux d'une protection naturelle contre les agressions mécaniques et environnementales, mais aussi de sa capacité à maintenir son hydratation. En effet, en l'absence de ce manteau protecteur, l'eau s'évapore plus facilement au niveau de cette zone, ce qui favorise l'apparition précoce des signes de vieillissement.

Une autre particularité intéressante du contour des yeux est son pH neutre, ayant une valeur d'environ 7. Cela diffère du reste de la peau, qui possède un pH plus acide, autour de 5,5. Cela s'explique notamment par la quasi-absence de film hydrolipidique à la surface de la peau du contour des yeux. C'est en effet cette émulsion qui est responsable de l'acidité naturelle de la peau. Le pH acide du film hydrolipidique est un facteur clé dans l'homéostasie de la barrière cutanée, l'intégrité de la couche cornée et la défense antimicrobienne. En effet, les céramides, des constituants essentiels de la couche cornée, sont synthétisés à un pH acide par des enzymes pH-dépendantes. Moins protégée, la zone du contour des yeux est aussi plus sujette aux inflammations, comme l'eczéma.

Les fibres de collagène et d'élastine, présentes dans le derme et synthétisées par les fibroblastes, jouent un rôle clé dans la résistance mécanique, la souplesse et l'élasticité de la peau. Plus précisément, le collagène, le constituant structural principal du derme, assure la cohésion et la fermeté de la peau, tandis que l'élastine lui confère sa capacité à reprendre sa forme après un étirement. Or, la densité de fibres de soutien est plus faible dans la zone du contour des yeux que sur le reste du corps. Cette particularité est en partie responsable de la formation de poches à cet endroit et rend le contour des yeux particulièrement vulnérable à la gravité et au vieillissement.

L'épiderme et le derme ne sont pas les seuls à présenter des spécificités : l'hypoderme, la couche la plus profonde de la peau, est elle aussi un peu particulière. Majoritairement constitué d'adipocytes, l'hypoderme a pour rôle d'amortir les chocs, de servir de réserve énergétique et de maintenir la température corporelle. Néanmoins, au niveau du contour des yeux, cette couche est extrêmement fine, ce qui contribue fortement à la fragilité de cette zone. La finesse de l'hypoderme accentue aussi la visibilité des reliefs du contour des yeux, comme les creux qui se forment avec l'âge et qui rendent le regard plus fatigué. En effet, au fil du temps, la légère couche graisseuse tend à glisser vers le bas et à s'accumuler au niveau de la paupière inférieure, un phénomène qui, ajouté à la faible production de collagène et d'élastine dans cette zone, favorise la formation de poches adipeuses.

Le contour des yeux se distingue par une vascularisation particulièrement dense, à la fois sanguine et lymphatique. Cette concentration de vaisseaux peut s'expliquer par la présence de nombreux organes à proximité qui nécessitent un apport constant en oxygène et en nutriments, comme les muscles périoculaires, les glandes lacrymales ou encore les nerfs et les annexes de l’œil. Couplée à une faible épaisseur de la peau, cette vascularisation dense participe à la forte visibilité par transparence des vaisseaux sanguins dans cette zone et à l'apparition de cernes bleutés.

"Les yeux sont le miroir de l'âme." Cicéron (106-43 avant J.-C.)

Si nos yeux reflètent aussi bien nos expressions et nos sentiments, c'est en partie parce qu'ils sont très expressifs. Cette zone abrite de nombreux muscles, 22 au total, qui sont en permanence sollicités, que ce soit à travers les mouvements oculaires, les clignements ou les différentes expressions faciales. Or, cette sollicitation répétitive du contour des yeux provoque des contraintes mécaniques qui accélèrent l'usure mécanique des tissus cutanés, notamment celle des fibres de soutien du derme, déjà peu présentes. Au fil du temps, la peau perd sa résistance à la traction et revient de plus en plus difficilement à sa place après avoir subi une déformation : les rides d'expression, initialement temporaires, deviennent alors permanentes.