Mécanisme de formation d'un grain de beauté.

Comment se forme un grain de beauté ?

L'apparition de grains de beauté sur la peau est courante. Ils peuvent prendre différentes tailles, couleurs et formes. Mais savez-vous comment ils se forment ? Découvrez dans cet article le mécanisme de formation des grains de beauté.

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Publié le 26 mars 2025, mis à jour le 26 mars 2025, par Pauline, Ingénieure chimiste — 8 min de lecture

Quel est le mécanisme de formation des grains de beauté ?

Aussi connu sous le nom de nævus, le grain de beauté est une excroissance bénigne et colorée de la peau. Si la taille des grains de beauté varie, leur diamètre moyen est estimé à 6 mm. Certains sont plats et lisses, tandis que d'autres sont surélevés, rugueux ou recouverts de poils. Contrairement à ce que l'on pourrait initialement penser, les grains de beauté ne sont pas nécessairement marrons ou noirs : il en existe également des bleus ou des gris. Dans tous les cas, les grains de beauté doivent être surveillés pour prévenir les mélanomes.

Les grains de beauté se forment lorsque les mélanocytes, les cellules de la couche basale responsables de la production de mélanine, prolifèrent de façon excessive et localisée.

En temps normal, les mélanocytes sont répartis uniformément à travers la peau mais, dans les grains de beauté, ils s'agglomèrent pour former des structures plus denses et visibles. Cette anomalie peut être influencée par des facteurs génétiques, certains individus exprimant davantage des gènes régulant la croissance et la différenciation des mélanocytes. Certaines études ont d'ailleurs montré qu'une mutation du gène BRAF était associée à un plus fort risque de mélanome et de nævus. Des facteurs hormonaux ou des expositions répétées et prolongées au soleil, dont les rayons UVB stimulent l'activité des mélanocytes, peuvent également être en cause. Les événements biologiques menant à une prolifération excessive des mélanocytes sont encore à l'étude mais les étapes suivantes sont supposées.

  • Étape 1 : Baisse de l'expression de l'E-cadhérine.

    L’E-cadhérine est une protéine qui assure l’adhésion des mélanocytes aux kératinocytes. Sa diminution entraîne le détachement des mélanocytes et favorise leur regroupement. Ce phénomène peut être induit par le facteur de croissance des hépatocytes, une molécule produite par les fibroblastes du derme. Ce facteur stimule la migration des mélanocytes et réduit l’expression de l’E-cadhérine, facilitant ainsi leur détachement. L’exposition aux rayons UV joue également un rôle en augmentant la production d’endothéline-1 par les kératinocytes, ce qui renforce la diminution de l’E-cadhérine et favorise la dispersion des mélanocytes. D’autres mécanismes pourraient être impliqués, notamment une modification épigénétique : une enzyme encore inconnue pourrait méthyler l’ADN et inhiber la production de l’E-cadhérine. Le TGF-β, un facteur impliqué dans la régulation cellulaire et la réponse aux signaux externes, pourrait aussi contribuer à ce processus.

  • Étape 2 : Perte des jonctions communicantes.

    Les jonctions communicantes, ou jonctions gap, permettent aux cellules de la peau d’échanger des signaux chimiques et électriques essentiels à leur coordination. Lorsque l’E-cadhérine est réduite, ces jonctions entre les mélanocytes et les kératinocytes se désorganisent, interrompant la communication intercellulaire. Les mélanocytes échappent alors aux signaux régulateurs envoyés par les kératinocytes. Bien que les conséquences exactes de cette perte de communication restent incertaines, elle pourrait perturber la répartition des mélanocytes et favoriser leur agrégation.

  • Étape 3 : Rétraction des dendrites.

    Les mélanocytes possèdent normalement des dendrites, de longs prolongements cellulaires qui leur permettent de transférer la mélanine aux kératinocytes environnants. Cependant, lors de la formation des grains de beauté, ces prolongements se rétractent, réduisant ainsi les interactions avec l’épiderme. Certains chercheurs supposent que cette rétraction pourrait être contrôlée par Rac1, une protéine appartenant à la famille des GTPases Rho, impliquée dans la régulation du cytosquelette cellulaire et la dynamique des prolongements cellulaires. Le mécanisme exact est encore mal compris mais certains facteurs physiques ou environnementaux, comme des modifications de la tension tissulaire, pourraient déclencher ce phénomène.

  • Étape 4 : Induction de la prolifération.

    Une fois les mélanocytes découplés des kératinocytes et dépourvus de leurs dendrites, ils peuvent entrer dans une phase de prolifération. Cette multiplication cellulaire serait stimulée par divers facteurs mitogènes, des molécules favorisant la division cellulaire. Ces facteurs peuvent être produits par les fibroblastes du derme, comme le facteur de croissance basique des fibroblastes, ou par les kératinocytes, qui libèrent notamment le facteur de croissance des cellules souches (SCF) et les leucotriènes. Parmi ces signaux, le SCF lié à la membrane des kératinocytes semble jouer un rôle clé car, une fois qu'il est libéré grâce à un clivage enzymatique, il stimule la prolifération des mélanocytes.

  • Étape 5 : Migration.

    Après leur prolifération, les mélanocytes doivent se disperser et se repositionner pour éviter une accumulation excessive. Normalement, ils sont espacés de cinq à huit kératinocytes le long de la membrane basale, et leur ancrage repose sur des intégrines, des protéines d'adhésion, comme par exemple le récepteur de la laminine α6β1. Un autre acteur potentiel de ce repositionnement est la voie de signalisation Notch, présente sur les membranes des cellules et pouvant être activée en fonction du ratio mélanocytes/kératinocytes, garantissant ainsi un équilibre cellulaire. Lorsque ce processus est défaillant, les mélanocytes peuvent migrer de façon anormale et provoquer l'apparition d'un nævus.

  • Étape 6 : Homéostasie.

    Une fois les mélanocytes positionnés, un rééquilibrage cellulaire doit s’opérer pour stabiliser leur organisation. Ce processus repose sur la réactivation de l’E-cadhérine, qui rétablit l’adhésion entre les cellules et permet la communication intercellulaire. Grâce à cette restauration des jonctions communicantes, les mélanocytes cessent de migrer et retrouvent un équilibre avec les kératinocytes environnants.

ÉtapeFonctionMoléculeInduction
1Adhésion cellule-celluleBaisse de l'expression de l' E-cadhérineAugmentation de l'expression du facteur de croissance des hépatocytes
2Jonction communicanteBaisse de l'expression des connexinesBaisse de l'expression de l' E-cadhérine
3Formation des dendrites Baisse de l'expression de Rac-1Tension
4ProliférationFacteur de croissance des cellules souchesClivage enzymatique
5Migration le long de la membrane basaleAugmentation de l'expression de α6β1Activation de TGFβ
6HoméostasieAugmentation de l'expression de l' E-cadhérine/
Étapes hypothétiques de formation d'un grain de beauté.
Source : SATYAMOORTHY K. & al. Lessons from melanocyte development for understanding the biological events in naevus and melanoma formation. Melanoma Research (2000).

Sources

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