Comment savoir si mon grain de beauté est dangereux ?

Les grains de beauté, ou nævus, sont des amas de mélanocytes, les cellules responsables de la production de mélanine. Bien que la plupart soient bénins, certains peuvent évoluer en mélanome, une forme dangereuse de cancer de la peau. En effet, dans un grain de beauté bénin, les mélanocytes prolifèrent localement mais conservent un certain contrôle de leur croissance et de leur différenciation. Cependant, suite à certaines mutations génétiques, ces cellules peuvent échapper aux mécanismes de régulation et proliférer de façon incontrôlée, menant alors à un mélanome.

L’une des mutations les plus fréquentes dans les mélanomes concerne le gène BRAF, retrouvé dans environ 50% des cas d'après l'étude de BOSENBERG et son équipe. Cette mutation s'accompagne d'une forte activation de la voie de signalisation MAPK, notamment impliquée dans la croissance cellulaire. La mutation du gène BRAF n'est pas la seule à être responsable de la formation d'un mélanome à partir d'un grain de beauté, d'autres concernant les gènes NRAS ou p16 peuvent perturber le cycle cellulaire et conduire à cette forme de cancer cutané.

La plupart des grains de beauté restent stables au fil du temps, mais certains peuvent évoluer de manière inquiétante et être précurseurs de lésions cancéreuses. C'est notamment le cas des nævus initialement lisses et réguliers qui deviennent bosselés, granuleux ou s'épaississent. Une texture rugueuse sans cause mécanique apparente ne doit pas être négligée et doit faire l'objet d'une consultation médicale. De même, il est recommandé de faire examiner ses grains de beauté ayant des bords irréguliers ou dont la couleur a changé ou est inhabituelle.

De façon générale, un grain de beauté qui évolue en quelques semaines ou quelques mois doit être surveillé.

Par ailleurs, il est important de noter qu'un grain de beauté ne doit normalement provoquer ni douleurs, ni démangeaisons, ni rougeurs, ni aucun autre signe d'inflammation. Si c'est le cas, cela peut vouloir dire qu'un processus inflammatoire sous-jacent est en train de se mettre en place au niveau du grain de beauté. Or, une activation anormale du système immunitaire dans cette zone peut être le signe d’un processus évolutif inquiétant. De même, si une dépigmentation progressive du nævus peut être appréciée pour des raisons esthétiques, cela peut en réalité révéler une altération des mélanocytes. En effet, dans certains cas, le système immunitaire attaque sans raison apparente ces cellules, entraînant leur destruction et une perte de coloration de la peau, selon un mécanisme proche de ce qui se produit en cas de vitiligo.

Un autre signe à ne pas négliger et pouvant potentiellement pointer vers un grain de beauté dangereux est un saignement spontané. Ce signe est particulièrement évocateur lorsqu’il s’accompagne d’un suintement ou d’une croûte qui ne guérit pas. À noter qu'on parle bien là de saignement sans traumatisme physique. Un nævus qui saigne lorsqu'il est accroché à un bijou à une fermeture éclair ne doit pas être source d'inquiétude, à condition de bien désinfecter la zone et de la protéger à l'aide d'un pansement.

Enfin, il est important prêter attention à l'apparition de nouveaux grains de beauté autour d'un nævus existant car cela peut suggérer un début de dissémination des mélanocytes anormaux dans les tissus environnants. Ce phénomène est particulièrement préoccupant lorsque les nouvelles lésions ont des caractéristiques irrégulières. La méthode ABCDE, présentée ci-dessous, reste un outil pratique et une référence pour évaluer l’apparence de ses grains de beauté.

Avoir un ou plusieurs facteurs de risques accroît le risque de développer un mélanome. Cela ne veut toutefois pas dire que les personnes ne présentant pas de facteurs de risques sont protégées et ne doivent pas surveiller leurs grains de beauté.

Un facteur de risque important pour le développement de grains de beauté atypiques ou de mélanomes est l’hérédité. Si un membre de la famille, en particulier un parent au premier degré, a eu un mélanome, le risque de développer ce type de cancer de la peau est accru, en raison de mutations génétiques spécifiques transmises de génération en génération. De même, les individus ayant la peau, les yeux ou les cheveux clairs sont naturellement plus vulnérables aux mélanomes, en raison de leur sensibilité accrue aux rayons UV. L'exposition solaire de façon générale et les antécédents de coups de soleil, en particulier ceux survenus durant l'enfance, sont également un facteur de risque majeur de développement d'un mélanome. C'est pourquoi le bronzage artificiel est si dangereux. D'après une étude publiée en 2011 dans le journal Progress in Biophysics and Molecular Biology, une exposition aux rayons UV artificiels avant l'âge de 30 ans augmente de 75% le risque d'avoir un mélanome.

Les personnes ayant de nombreux grains de beauté sur le corps, plus de 50, sont également plus susceptibles de présenter un nævus dangereux. L'âge est également un facteur de risque, les mélanomes apparaissent le plus souvent après 40 ans, même si certains se développent avant. Enfin, certaines maladies héréditaires, comme le syndrome de Werner qui fait vieillir la peau prématurément ou le xeroderma pigmentosum qui empêche la peau de réparer les dommages causés par le soleil, augmentent le risque de formation d'un mélanome.