Le phosphate de clindamycine, une solution alternative dans le traitement de l’acné rosacée ?

Le phosphate de clindamycine est un antibiotique appartenant à la classe des lincosamides. Fréquemment utilisé pour traiter l'acné, il prescrit en cas de rosacée papulo-pustuleuse, une forme particulière de rosacée parfois confondue avec l'acné car engendrant des symptômes similaires. En effet, outre les rougeurs caractéristiques de la rosacée, la rosacée papulo-pustuleuse entraîne l'émergence de papules, voire dans certains cas de pustules. Cette forme peut fortement impacter la confiance et l'estime de soi du patient atteint.

La rosacée papulo-pustuleuse est généralement traitée à l'aide d'antibiotiques, notamment de phosphate de clindamycine. La clindamycine agit sur les bactéries au niveau des mécanismes d'assemblage des ribosomes ainsi que sur le processus de traduction. La clindamycine cible directement la boucle peptidyl-transférase située sur la sous-unité ribosomique 50S, correspondant au site de formation de la liaison peptidique au cours des dernières étapes de la synthèse des protéines bactériennes. Les bactéries ne pouvant pas survivre sans leurs protéines, l'interférence provoquée par la clindamycine entraîne leur destruction.

Il est intéressant de savoir que le phosphate de clindamycine est inactif in vitro. Cependant, lorsqu'il est appliqué sur la peau, il est rapidement transformé par hydrolyse rapide en clindamycine, un composé qui, comme décrit plus haut, est capable d'exercer une activité antibactérienne. Par ailleurs, la clindamycine présente des propriétés anti-inflammatoires intéressantes pour réduire les lésions inflammatoires retrouvées sur les peaux souffrant de rosacée papulo-pustuleuse. Elle agit notamment en inhibant la libération du facteur de transcription NF-κB et de l'enzyme COX-2, impliquée dans la production de prostaglandines inflammatoires.

Les effets de la clindamycine ont été évalués lors d'une étude menée par DEWITT et son équipe. Pour cela, 43 patients atteints de rosacée ont été recrutés. Deux groupes ont été formés. Les volontaires du premier groupe ont appliqué deux fois par jour un gel à base de clindamycine et ont pris 250 mg de tétracycline quatre fois par jour. Ceux du second groupe ont aussi appliqué le gel mais ont reçu des capsules placebo. Après trois mois, les scientifiques ont observé une diminution globale de l'érythème, une baisse moyenne de 50% des papules et une diminution de près de 75% des pustules chez tous les patients, sans noter de différence significative entre les deux groupes.

Généralement bien toléré, le phosphate de clindamycine est une solution intéressante pour lutter contre l'acné rosacée. Pour renforcer son efficacité, il est souvent associé à des rétinoïdes topiques, tels que la trétinoïne.

Bien que le phosphate de clindamycine soit majoritairement très bien toléré, il peut parfois provoquer des effets secondaires indésirables. Ainsi, il a été observé que ce médicament pouvait dans de rares cas entraîner des maux de tête, des rougeurs, de la sécheresse cutanée, des démangeaisons ou encore une irritation locale. Si ces effets persistent ou s'aggravent, il est important d'en parler à son médecin, afin que celui-ci puisse adapter le traitement. À noter qu'il est déconseillé d'appliquer un gel à base de phosphate de clindamycine près des yeux, de la bouche ou des muqueuses. En cas de contact accidentel, un rinçage à l’eau froide instantané réduit les risques d’irritation.

Il est également important de savoir que le phosphate de clindamycine est généralement déconseillé aux femmes enceintes ou allaitantes. En effet, cette substance est suspectée de pouvoir passer dans la circulation sanguine et d'atteindre le lait maternel. Le phosphate de clindamycine pourrait alors provoquer des troubles au niveau du microbiote du nourrisson. Par ailleurs, ce médicament est aussi contre-indiqué aux personnes présentant une hypersensibilité à la lincomycine, un autre antibiotique de la famille des lincosamides. Enfin, dans de très rares cas, la clindamycine a été associée à des colites pseudo-membraneuses, faisant suite à une inflammation du côlon. Une attention particulière doit donc être portée en cas de diarrhée survenant au cours d'un traitement au phosphate de clindamycine.

• DEWITT S. & al. Treatement of rosacea : Topical Clindamycine versus oral tetracycline. International Journal of Dermatology (1993).

• FORBES B. & al. Activation of clindamycin phosphate by human skin. Journal of Applied Microbiology (2001).

• CHAUDHRY M. & al. Rosacea and its management: an overview. Journal of the European Academy of Dermatology & Venereology (2005).

• VIDAL. Substance Active Clindamycine. (2013).