Les vernis à ongles comme perturbateurs endocriniens.

Les vernis à ongles, une source d'exposition aux perturbateurs endocriniens ?

Produit indispensable pour bon nombre de personnes, le vernis à ongles est parfois pointé du doigt pour ses effets sur la santé et est suspecté de contenir des perturbateurs endocriniens. Faut-il réellement s'inquiéter ? Le vernis à ongles constitue-t-il une source d'exposition aux perturbateurs endocriniens ? Découvrez plus d'informations à ce sujet dans cet article.

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Publié le 7 avril 2025, mis à jour le 14 avril 2025, par Pauline, Ingénieure chimiste — 7 min de lecture

Les vernis à ongles contiennent-ils des perturbateurs endocriniens ?

D'après l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), un perturbateur endocrinien est "une substance ou un mélange de substances, qui altère les fonctions du système endocrinien et de ce fait induit des effets néfastes dans un organisme intact, chez sa progéniture ou au sein de sous-populations".

Plus simplement, il s'agit d'une famille de composés capables d'interagir avec le système hormonal, affectant ainsi différentes fonctions de l'organisme (métabolisme, système nerveux, fonctions reproductrices...). Les perturbateurs endocriniens peuvent par exemple interagir avec la synthèse, le transport, le mode d'action ou encore la dégradation d'hormones. Le plus souvent, ces substances modifient la production naturelle d'hormones intrinsèques, miment l'action de ces hormones en se substituant à elles ou empêchent leur action en se fixant sur les récepteurs avec lesquels elles interagissent habituellement. L'exposition aux perturbateurs endocriniens est particulièrement problématique pour les femmes enceintes et les jeunes enfants, dont le système endocrinien est très vulnérable aux altérations chimiques. Malheureusement, les perturbateurs endocriniens sont omniprésents dans notre quotidien et peuvent même se cacher dans certains cosmétiques.

Plusieurs études ont montré que certains composés retrouvés dans de nombreux vernis à ongles pouvaient interférer avec le système hormonal. Parmi les molécules problématiques, on retrouve les phtalates, et en particulier le phtalate de dibutyle (DBP), autrefois très utilisé pour assouplir les vernis et éviter qu’ils ne s’écaillent trop vite. Le phtalate de dibutyle est aujourd'hui interdit dans l’Union européenne en raison de son impact avéré sur le système reproducteur. Des recherches ont montré qu’il pouvait altérer la production de testostérone chez les hommes et accélérer l'arrivée de la puberté chez les femmes.

Malgré le retrait du DBP des vernis à ongles, l'inquiétude persiste.

En effet, le phtalate de dibutyle n'était pas le seul ingrédient problématique des vernis à ongles. Les parabènes, des conservateurs souvent retrouvés dans les vernis à ongles, sont également suspectés d'être des perturbateurs endocriniens. Ces molécules pourraient imiter l'action des œstrogènes et se lier aux récepteurs spécifiques à ces hormones, entraînant de fait leur activation. Les parabènes suscitent ainsi des interrogations quant à leurs conséquences sur la fertilité et leur rôle dans la survenue de cancers hormono-dépendants, comme le cancer du sein. Des études réalisées chez les rongeurs rapportent des effets des parabènes sur les appareils reproducteurs mâles et femelles, mais d'autres travaux réalisés chez l'homme ne montrent pas d'association entre les concentrations de parabènes urinaires et les taux d'hormones circulant ou la qualité du sperme. Les études épidémiologiques disponibles à ce jour sont encore trop peu nombreuses pour affirmer que les parabènes sont des perturbateurs endocriniens mais certains éléments incitent à la prudence.

Un autre agent présent dans les vernis à ongles est souvent incriminé : le phosphate de triphényle (TPHP). Également utilisée dans les encres et les peintures, cette molécule est aussi suspectée d'interagir avec le système hormonal et de le perturber. Les données sur sa toxicité chez l'Homme sont rares mais des travaux menés chez les animaux inquiètent. Il a par exemple été montré que l'exposition à court terme (21 jours) au phosphate de triphényle chez le poisson zèbre était associée à une altération de l'équilibre des hormones sexuelles et de la fonction reproductrice. Même si le TPHP n'est pas un perturbateur endocrinien avéré, il reste préoccupant, d'autant plus que, selon la base de données internationale Skin Deep, gérée par l'Environmental Working Group et recensant plus de 27 000 cosmétiques, le TPHP figurait sur l'étiquette d'environ un vernis sur deux disponible à la vente entre 2012 et 2015.

Une étude a récemment cherché à évaluer si l'application de vernis à ongles représentait une voie d'exposition potentielle au TPHP. Pour cela, les niveaux urinaires de phosphate de diphényle (DPHP), un métabolite principal du TPHP, ont été mesurés avant et après l’application d’un vernis contenant du TPHP sur les ongles ou sur des gants, afin de déterminer si le TPHP pénétrait par voie cutanée ou par inhalation. Les résultats ont révélé une augmentation significative des niveaux urinaires de DPHP après application du vernis directement sur les ongles, contrairement à l’application sur des gants, ce qui suggère une absorption majoritairement cutanée du TPHP. Si des recherches supplémentaires sont encore nécessaires pour confirmer la dangerosité du TPHP et son rôle potentiel de perturbateur endocrinien, ces données soulignent l’intérêt de rester vigilant quant à son utilisation.

Niveaux urinaires de DPHP avant et après application de vernis à ongles sur les mains ou sur des gants.
Niveaux urinaires de DPHP avant et après application de vernis à ongles sur les mains ou sur des gants.
Source : STAPLETON H. M. & al. Nail polish as a source of exposure to triphenyl phosphate. Environment International (2016).

Certains composés présents dans les vernis à ongles sont suspectés d'interagir avec le système endocrinien mais les données restent encore limitées. Ainsi, si la prudence est de mise, il est actuellement difficile d'affirmer que les vernis à ongles sont une source d'exposition aux perturbateurs endocriniens.

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