Le vitiligo est-il associé à des comorbidités ?

Par ailleurs, une étude rétrospective a été menée de 1996 à 2011 via la base de données de recherche de l'assurance maladie nationale à Taïwan et a montré une forte corrélation entre le vitiligo et plusieurs maladies. Au total, 14 883 patients atteints de vitiligo et 59 532 personnes ne présentant pas de vitiligo ont été enregistrés. Il a été montré que les individus touchés par le vitiligo avaient une prévalence plus élevée de comorbidités multiples. En effet, 14,3% des patients atteints de vitiligo de l'étude présentaient au moins une autre maladie auto-immune, tandis que seulement 6% des individus "sains" souffraient d'au moins une maladie auto-immune.

En plus des maladies auto-immunes, les chercheurs ont mis en évidence une association entre le vitiligo et certains troubles atopiques, cette relation étant à nouveau liée à des prédispositions génétiques communes. L’étude rétrospective a également permis d’identifier les maladies auto-immunes et atopiques les plus fréquemment associées au vitiligo. Les chercheurs ont comparé leur prévalence parmi les patients atteints de vitiligo et ceux ne souffrant pas de cette dermatose, comme le montre le tableau ci-dessous.

Il est également suspecté que le vitiligo serait lié à des anomalies oculaires car, en plus d'être présents dans la peau, les mélanocytes sont abondants dans le corps ciliaire, l'iris et l'épithélium pigmentaire rétinien. Ils donnent d'ailleurs leur couleur aux yeux. Plusieurs études se sont intéressées au potentiel lien entre le vitiligo et les troubles oculaires et certaines ont indiqué une tendance légèrement plus importante des patients atteints de cette dermatose à avoir les yeux secs et à souffrir de glaucome, une maladie chronique de l'œil due à des lésions du nerf optique. Néanmoins, le nombre de participants dans ces études était assez restreint et ne permettait pas de réellement conclure.

Par ailleurs, la littérature scientifique mentionne une association possible entre le vitiligo et les troubles auditifs. En effet, les mélanocytes sont également répartis dans le labyrinthe membraneux de l'oreille interne et, si leur rôle n'est pas entièrement élucidé, on pense qu'ils jouent un rôle dans l'audition. Des chercheurs ont ainsi investigué si le vitiligo était associé à des troubles de l'audition. Plusieurs études semblent indiquer que les patients touchés par cette dermatose sont plus sujets à développer des anomalies auditives. Toutefois, il s'agit encore une fois d'études menées avec de très faibles échantillons de population, desquelles il est délicat de tirer des conclusions solides.

Il est aujourd'hui difficile d'affirmer qu'il existe un lien entre le vitiligo et les maladies visuelles ou auditives.

Le vitiligo va au-delà de la simple préoccupation cosmétique et peut avoir un réel impact sur la psychologie des patients en raison de son caractère affichant et stigmatisant. En effet, plusieurs études ont montré que, par rapport à la population générale, les patients atteints de vitiligo tendaient à avoir une moins bonne image de leur corps, une plus faible estime d'eux-mêmes et des niveaux plus élevés de détresses sociale et psychologique. Il a ainsi été suspecté que l'impact substantiel du vitiligo sur la qualité de vie des patients pouvait être à l'origine de troubles psychiques. Afin d'explorer plus en avant cette hypothèse, une étude rétrospective a été menée entre 2000 et 2013. Au total, 1432 sujets atteints de vitiligo et 5728 témoins ont été recrutés.

Après recensement des troubles psychologiques des individus et ajustement en fonction du sexe, de l'âge, de la comorbidité, de l'urbanisation et du niveau de soins de l'établissement, le rapport de risque ajusté de l'ensemble des troubles psychiatriques chez les patients atteints de vitiligo était de 2,926. Cela signifie que, pour la population étudiée, les chercheurs ont mesuré que les personnes présentant du vitiligo avaient près de 3 fois plus de risques de souffrir d'un problème psychique. D'après l'étude, ce sont surtout les troubles obsessionnels compulsifs qui sont concernés, avec un rapport de risque ajusté de 10,790.

La charge psychosociale liée au vitiligo est significative et pourrait expliquer l’association observée avec un risque accru de troubles psychiatriques. Cela souligne l’importance pour les médecins de prendre en compte la santé mentale des patients atteints de cette maladie, afin de leur offrir une prise en charge globale.